Dernière mise à jour le 29/11/2020

Expulsion : Refus du concours de la force publique et recours contre l’Etat

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Vous avez obtenu en justice une décision ordonnant l’expulsion de votre locataire pour loyers impayés ou pour validation de votre congé, et celui-ci se maintient toujours dans les lieux malgré la délivrance d’un commandement de quitter les lieux en raison du refus du concours de la force publique ? Vous pouvez obtenir réparation de votre préjudice en intentant un recours contre l’Etat .

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Quel sont les recours du bailleur contre l’Etat en cas de refus de concours de la force publique ?

Le propriétaire muni d’une décision judiciaire prononçant l’expulsion de son locataire doit saisir un huissier de justice afin d’exécuter cette décision de justice. L’huissier est ainsi tenu de délivrer un commandement de quitter les lieux à l’occupant qui dispose d’un délai de deux mois pour restituer les lieux (Art. L. 411-1 CPCE). Ledit commandement est également notifié au préfet.

Nonobstant la délivrance du commandement, il est courant qu’à l’expiration du délai de 2 mois, l’occupant se maintienne toujours dans les lieux. L’huissier, ne pouvant l’obliger à quitter les lieux, doit alors requérir le concours de la force publique.

A compter de la réquisition du concours de la force publique, le Préfet dispose d’un délai de deux mois pour accorder ou non le concours de la force publique, soit 4 mois à compter de la signification du commandement de quitter les lieux. Cependant, il arrive que l’État refuse son concours, soit expressément, soit implicitement en s’abstenant de répondre à l’huissier dans le délai de deux mois suivant la délivrance du procès-verbal de réquisition de la force publique.

Si le concours n’est pas accordé, le propriétaire qui ne perçoit plus en général les indemnités d’occupation par son ancien locataire, peut intenter un recours contre l’Etat afin de voir sa responsabilité engagée et solliciter une indemnisation du préjudice subi sous certaines conditions en application de l’article L. 153-1 du CPCE.

Ce refus peut être justifié par des considérations sociales liées à l’âge et à la situation familiale du locataire défaillant ou bien au trouble à l’ordre public qu’entrainerait l’expulsion.

Notre Cabinet, accoutumé de ce type de recours, saura vous assister afin d’obtenir la réparation de votre préjudice.

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Etape 1 : le recours gracieux contre l’Etat

Avant de saisir la juridiction administrative, le propriétaire bailleur qui s’estime lésé doit exercer un recours gracieux contre le Préfet, dès le refus exprès de l’Administration ou bien à l’expiration du délai de 2 mois après le dépôt de la réquisition.

La demande prend la forme d’une requête adressée au Ministre de l’intérieur ou au Préfet par courrier recommandé avec accusé réception à la préfecture ou par sommation d’un huissier de justice. Cette requête a pour but de solliciter l’annulation de la décision expresse ou tacite du refus de concours et de chiffrer le préjudice subi. L’ensemble des pièces en copie de la procédure, une première évaluation du préjudice et les justificatifs doivent être joint à ladite demande.

Suite à cette requête, l’Administration a un délai de 4 mois pour rendre sa décision, qui peut être favorable ou défavorable au bailleur. Son silence à l’issue dudit délai équivaut à un refus de sa part.

En pratique, le plus souvent, le seul fait de demander l’indemnisation permet au bailleur d’obtenir une indemnisation correspondant aux impayés postérieurs à la décision refusant le concours de la force publique, de telle manière que les recours contentieux devant le Tribunal administratif se font de plus en plus rares.

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Etape 2 : Le recours contentieux contre l’Etat

Dans l’hypothèse d’un refus implicite ou explicite de l’Administration, le propriétaire bailleur dispose de deux mois pour saisir le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve l’immeuble loué. Le recours à l’avocat est obligatoire.

A cette occasion, notre Cabinet rappellera la procédure mise en œuvre, les diligences de l’Huissier aux fins d’obtention du concours de la force publique et le recours gracieux présenté contre la décision de refus. Nous chiffrerons et détaillerons votre préjudice, à savoir notamment le montant des indemnités d’occupation qui vous sont dues, les éventuelles réparations locatives et frais de procédure que vous avez engagés.

La décision du Tribunal Administratif sera notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception et sera susceptible d’appel devant la Cour administrative d’appel.

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Etape 3 : En cas d’urgence, le référé liberté contre l’Etat

Par son refus de prêter le concours de la force publique, l’Administration peut commettre une atteinte grave et manifestement illégale aux droits du bailleur. A cette fin, notre cabinet est compétent pour engager une procédure d’urgence appelée référé-liberté, et aux termes de laquelle le juge doit se prononcer dans les 48 h à compter de la requête (Art. L 521-2 du CJA). Pour engager une telle procédure, l’atteinte grave et l’illégalité manifeste devront être spécialement caractérisées.

Tel est le cas lorsque l’occupant présente un danger pour la sécurité des habitants de l’immeuble par exemple. N’est pas considéré constitutif d’une urgence la perte de revenus locatifs et l’incidence d’une occupation sans droit ni titre d’une partie de l’immeuble (CE réf. 30/10/2003, n°261353, Sté Kentucky)

Le recours contre cette décision sera porté devant le Conseil d’Etat qui se prononcera dans les mêmes délais.

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Comment calculer le préjudice subi du bailleur auprès de l’Etat ?

Le propriétaire peut demander le paiement des indemnités d’occupation dues par l’occupant depuis la date d’expiration des deux mois suivant le procès-verbal de réquisition de la force publique ou de la demande de concours de la force publique adressée par l’huissier au préfet jusqu’à la date à laquelle le préfet accorde le concours de la force publique. Le point de départ du délai peut être éventuellement prolongé par l’effet de la trêve hivernale  (qui débute le 1er novembre au 31 mars) si le délai de deux mois expire pendant cette période. A toutes fins, les créances détenues à l’encontre de l’Etat se prescrivent par un délai de 4 ans.

A titre illustratif :

– si le PV de réquisition du concours de la force publique est datée du 15 mai 2017 alors la responsabilité de l’Etat débute au 15 juillet 2017.

 

– si le PV de réquisition de la force publique est délivré le 15 octobre, le délai de 2 mois expire donc au 15 décembre, soit après le début de la période d’hiver, laquelle débute le 1er novembre. Dans une telle hypothèse, le point de départ de la responsabilité de l’État sera décalé au 1er avril de l’année suivante.

Par ailleurs, si l’expulsion tarde à intervenir malgré la décision accordant le concours de la force publique et que ce retard est imputable à l’administration, alors la responsabilité de l’Etat reprend à compter du 15ème jour après la décision octroyant le concours (Arrêt CE 27 janv. 2010)

Le montant de l’indemnisation susceptible d’être obtenu par le bailleur correspond :

– au montant de l’indemnité d’occupation à compter de l’expiration du délai de 2 mois suivant le procès-verbal de réquisition de la force publique ;

 

– aux charges non réglées à compter de l’expiration du délai de 2 mois suivant le procès-verbal de réquisition de la force publique ;

 

– aux taxes récupérables sur le locataire, et notamment la taxe sur les ordures ménagères, peuvent être obtenues sur présentation de justificatif ;

 

– au montant des dégradations commises par les occupants ;

 

– éventuellement des dommages et intérêts liés au refus.

Ainsi, s’agissant des loyers et charges impayés antérieurs au début de la période de responsabilité de l’Etat et par voie de conséquence ceux qui sont antérieurs à la décision de justice prononçant l’expulsion, seules les voies d’exécutions classiques sont possibles pour obtenir le recouvrement de l’arriéré (saisie attribution sur compte/ rémunération, saisie vente des meubles…).

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