Dernière mise à jour le 29/11/2020

A quelles conditions un agent immobilier a droit à rémunération ?

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Parmi les litiges ayant trait au contentieux de la vente immobilière, la rémunération de l’agent immobilier est source d’un contentieux abondant.  L’agent ne peut exiger le paiement sa commission que sous réserve du respect de certaines conditions.  Notre Cabinet vous éclaire sur les conditions de rémunérationde l’agent immobilier.

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L’agent immobilier est un mandataire, qui moyennant commission apporte son concours aux opérations juridiques portant sur les biens immobiliers ou fonds de commerce appartenant à autrui. Cette profession est strictement réglementée par la loi Hoguet du 2 janvier 1970 dont ses dispositions sont d’ordre public.

1ère condition : l’agent immobilier doit avoir un mandat régulier

Le mandat donné aux agents immobiliers doit obéir non seulement aux règles de droit commun du contrat : capacité, consentement, et contenu licite et certain (1128  C. civ) mais également à celles exorbitantes du droit commun imposées par la loi Hoguet et son décret d’application.

Quelles sont les conditions que doit remplir un mandat pour être régulier ?

Le mandat doit être écrit

Les agents immobiliers doivent avoir un mandat écrit pour chaque opération à laquelle il concourt préalablement à toute négociation ou engagement.

A défaut d’écrit, l’agent immobilier n’a pas le droit de percevoir une quelconque rémunération.

Le mandat doit être limité dans le temps

Le mandat doit être limité dans le temps à peine de nullité. Il s’agit d’une nullité relative qui ne peut être invoquée que par le mandant de l’agent immobilier.

En général, elle est fixée à 3 mois et il est possible de prévoir une clause de tacite reconduction à la condition qu’elle soit également limitée dans le temps.

Le mandat doit définir les obligations de l’agent

La preuve et l’étendue de son mandat ne peuvent être rapportées que par écrit et est soumise aux exigences de l’article 1359 du Code civil.

Seul le sous-mandat donné par le mandataire initial à un autre professionnel de l’immobilier peut échapper à cette condition dès lors qu’il n’est pas soumis à la loi Hoguet. Mais tout écrit ne constitue pas un mandat.

Le mandat doit contenir des mentions obligatoires

A peine de nullite, il doit contenir certaines mentions obligatoires :

– le nom du mandant, du mandataire et de la durée du mandat

– objet du mandat et pouvoirs de l’agent immobilier

– Maniement des fonds

– Reddition des comptes

– Détermination de la rémunération : si elle est à la charge exclusive de l’une des parties ou si elle est à frais partagés

– Moyens mis en œuvre par le professionnel

– Numéro de registre

– signature et nombre d’originaux

– information sur la reconduction éventuelle du mandat

 

Le mandat peut prévoir une clause d’exclusivité

Le mandat peut accorder une exclusivité à l’agent immobilier.

Il doit alors préciser que passé un délai de 3 mois, il peut être dénoncé à tout moment par chacune des parties, à charge par celle qui entend d’y mettre fin d’en aviser l’autre 15 jours au moins à l’avance par LRAR, ainsi que les actions qu’il s’engage à réaliser si son client est un non professionnel.

Le mandat exclusif interdit alors au client de faire appel à un autre professionnel pour vendre son bien ou de le vendre par lui-même. Néanmoins le client peut se réserver la possibilité de trouver un acquéreur par lui-même s’il le mentionne expressément dans le mandat au moyen d’annonces entre particuliers par exemple.

 

Le mandat peut prévoir une clause pénale ou de garantir de rémunération

 Les clauses d’exclusivité sont assorties en général d’une clause pénale ou d’une clause d’exclusivité.

Cette clause prévoit qu’une commission sera due à l’agent même si l’opération est finalement réalisée sans son intervention. En présence d’une telle clause, le mandat doit préciser que passé un délai de 3 mois, il peut être dénoncé à tout moment par chacune des parties, à charge par celle qui entend d’y mettre fin d’en aviser l’autre 15 jours au moins à l’avance par LRAR.

 

 

Ai-je droit à rémunération en cas de mandat irrégulier ou en l’absence de mandat ?

L’absence de mandat préalable ou l’irrégularité du mandat emporte la déchéance du droit à rémunération de l’agent immobilier.

Cas n°1 : l’absence de mandat

Ainsi l’agent immobilier qui ne détenait pas encore de mandat écrit lorsqu’il a fait visiter des locaux en vue de leur location et à commencer à négocier ne peut prétendre à aucune commission ou rémunération.

Cas n°2 : le mandat est irrégulier

Toutefois, en l’absence d’un mandat régulier, il est admis que l’agent immobilier puisse percevoir une rémunération si, par une convention ultérieure à l’acte authentique de vente, le client s’engage à rémunérer l’agent immobilier.

Deux conditions cumulatives sont alors requises :

– la convention doit être ultérieure à l’acte authentique ;

– la vente intervient entre les 2 parties rapprochées par l’agent immobilier.

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Condition n°2 : Participation effective de l’agent immobilier à l’activité d’entremise

  • Cas n°1 : absence de clause d’exclusivité ou clause pénale dans le mandat de l’agent immobilier 

En l’absence d’une clause d’exclusivité, l’agent n’a droit à ses honoraires que dans la mesure où l’opération a été conclue avec son concours. 

Le fait générateur qui ouvre droit aux honoraires réside généralement dans la présentation du bien à un acquéreur.

Toutefois lorsqu’un bien a été donné à plusieurs agences immobilières, le fait générateur n’est pas nécessairement la première présentation du bien, mais peut résulter de diligences postérieures permettant la conclusion effective de l’opération. 

Ainsi, le vendeur n’est tenu de payer une rémunération qu’à celui par l’entremise duquel l’opération a été effectivement conclue et ce, même si l’acquéreur a été présenté par un autre agent immobilier précédemment. 

L’agent évincé qui a présenté l’acquéreur peut seulement obtenir des dommages et intérêts s’il parvient à prouver la faute du vendeur, qui par un abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l’a privé de la réalisation de la vente. A ce titre il a été jugé que la faute n’est pas prouvée si elle résulte de l’inertie de l’agence et qu’en conséquence les vendeurs ont traité avec un autre agent.

Par ailleurs, il a été jugé que la clause qui fait interdiction au mandant de traiter directement avec un acquéreur présenté par l’agence ne lui interdit pas de traiter, à des conditions différentes, par l’intermédiaire d’un autre agent immobilier.

De même, si le vendeur trouve un acquéreur par ses propres moyens ou grâce à un tiers, l’agent immobilier n’a le droit à aucune rémunération, en dépit de toutes les diligences éventuelles qu’il a pu effectuer.

Toutefois, si la vente a été conclue directement entre les parties, la seule présentation de l’acquéreur par l’agent préalablement à la vente suffit à donner naissance au droit à rémunération telle que prévue au mandat.

Lorsque par sa faute, l’acquéreur a fait perdre à l’agent sa commission, il lui doit réparation de son préjudice sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle, même s’il n’est pas débiteur de la commission. Tel est le cas en présence de manoeuvres frauduleuses des acquéreurs qui se sont présentés sous une fausse identité à l’agent pour visiter un appartement dans le dessein d’évincer l’agent de la perception de sa commission. En l’espèce, l’agent a pu demander des dommages et intérêts fondé sur l’article 1240 du Code civil, équivalent à la perte de commission (Cass. Ass. plein.  9 mai 2008, n°0712449)

Il en va de même en cas de manoeuvres frauduleuses de l’acquéreur et du vendeur et que l’agent a été alors privé de sa commission. Même si l’acquéreur final n’est pas exactement la personne à qui l’agence a fait visiter le bien, les juges du fonds doivent rechercher si l’opération ne dissimule pas en réalité une fraude destinée à priver l’agent de sa commission et auquel cas s’il n’est pas en droit de demander sa commission.

Le droit à rémunération subsiste au-delà de la durée de validité du mandat. Seule la visite doit avoir été effectuée en période de validité du mandat. La charge de la preuve incombe à l’agent. S’il ne justifie pas avoir, durant le temps de validité du mandat exclusif de vente présenté, adressé ou indiqué à son mandant le nom de la personne ayant acquis ultérieurement le bien, il ne peut prétendre à une commission.

  • Cas n°2 : En présence d’un mandat qui contient une clause d’exclusivité ou clause pénale

Il est possible de prévoir dans le mandat de vente une clause d’exclusivité ou une clause pénale aux termes de laquelle il est stipulé expressément que les honoraires seront dus à l’agent même si l’opération est conclue sans ses soins. Ainsi, l’agence titulaire du mandat exclusif peut prétendre au paiement de l’indemnité compensatrice prévue par la clause pénale du mandat, même si elle n’a réalisé aucune vente par son entremise. Toutefois, l’indemnité mise à la charge du vendeur peut être réduite si elle est jugée manifestement excessive par les juges du fond.

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Condition n°3 : La vente doit avoir été conclue

L’agent a le droit au paiement de ses honoraires qu’une fois que la vente a été définitivement conclue.

Toutefois, en cas d’échec de la vente, l’agent immobilier peut dans certaines circonstances percevoir des dommages et intérêts, en cas de faute de son mandant ou manoeuvres dolosives de l’acquéreur et du vendeur.

L’acte de vente doit contenir l’engagement des parties au paiement des honoraires de l’agent

Ce n’est qu’une fois que la vente conclue et constatée dans un acte écrit contenant l’engagement des parties que l’agent a le droit au paiement de ses honoraires. Avant, il ne peut percevoir aucune somme.

A défaut d’acte écrit constatant le transfert de propriété, la clause contractuelle selon laquelle la rémunération de l’agent resterait due en cas de refus par l’une des parties de régulariser la vente par acte authentique est dépourvue d’effet.

Quel est le sort de la commission de l’agent en cas d’échec de la vente ?

– Principe : l’agent ne peut percevoir sa commission

Le droit à rémunération est exclu si la vente n’a pas abouti en raison d’un motif personnel à l’acquéreur ou au vendeur. Ainsi, un acquéreur qui n’entreprend aucune démarche pour obtenir son financement dans les délai requis conformément aux caractéristiques de la promesse de vente ou qui en a empêché la réalisation par son comportement peut être considéré comme fautif.

– Exception : l’agent peut obtenir des dommages-intérêts en cas de faute de l’acquéreur ou du vendeur

Toutefois, il pourra agir en réparation de son préjudice s’il prouve une faute de l’acquéreur et obtenir des dommages et intérêts.

Même s’il n’est pas débiteur de la commission, l’acquéreur dont le comportement fautif a fait perdre à l’agent immobilier sa rémunération doit réparation de son préjudice sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle.

De même est fautif le comportement de l’acquéreur qui va visiter un bien par l’intermédiaire d’un agent immobilier titulaire d’un mandat du vendeur, puis qui acquiert ce bien directement auprès du vendeur, après avoir fait usage de manoeuvres frauduleuses pour évincer l’agent.

Toutefois, la jurisprudence considère que si le vendeur refuse d’accepter l’offre d’achat au prix fixé dans le mandat, l’agent n’a droit à aucune commission, même en présence d’une clause pénale prévoyant que la rémunération du mandataire sera intégralement due en cas de refus de l’une des parties de régulariser la vente par acte authentique.

Le refus du mandant de réaliser la vente ne constitue pas une faute pouvant justifier sa condamnation au paiement de dommages intérêts sauf s’il est établi qu’il a conclu la vente en privant le mandataire de sa rémunération.

Lorsque la faute du mandant est établie, l’évaluation du préjudice subi par l’agent immobilier relève de la libre appréciation des juges du fond qui peut aller jusqu’à 100 % de la commission s’ils estiment que l’agent à perdu une chance d’être rémunéré par le fait des vendeurs.

Toutefois, les juges sont très sévères dans l’appréciation des moyens invoqués en justice par les agents immobiliers, et se résout le plus souvent en allocation de dommages et intérêts et non au montant de la commission que l’agent aurait pu percevoir en cas de réalisation de la vente. De surcroît leur demande doit être fondée sur la faute commise par l’une des parties à l’acte et le préjudice qui en résulte pour l’agent et non sur les dispositions du mandat, telle que la clause pénale.

Condition n°4 : Nécessité d’un engagement définitif entre les parties

L’acte authentique de vente doit être signé

Une fois l’acte authentique signé constatant la vente, l’agent a le droit à sa rémunération, même si par la suite elle n’est pas exécutée. Tel est le cas de la vente anéantie par l’effet d’une clause résolutoire, ou  conclue finalement avec un tiers et non avec la partie initialement prévue.

Quid si l’acte contient une clause de dédit ou une condition suspensive ?

Si l’engagement des parties contient une clause de dédit ou une condition suspensive, l’opération ne peut être considérée comme conclue, tant que lesdites clauses ne se sont pas réalisées.

Même lorsque la condition suspensive d’obtention d’un prêt à laquelle est soumis le compromis de vente est réputée accomplie en vertu de l’article 1304-3 du Code civil, parceque l’acquéreur en a empêché la réalisation par son comportement, l’agent n’a pas droit à la commission faute de réalisation effective de l’opération, ni exiger l’indemnité prévue à titre de clause pénale insérée dans son mandat ou dans la promesse de vente. Il n’aura droit qu’à des dommages et intérêts s’il prouve la faute de la personne qui a refusé de poursuivre la vente.

Quid en cas de résolution de la vente pour vice caché ?

La commission lui reste acquise, s’il n’a commis aucune faute. Le vendeur fautif supportera, seul, la charge de la commission qu’il doit restituer à l’acheteur victime des vices cachés s’il s’en était acquittée.

Quid en cas d’exercice du droit de préemption?

Le montant de la rémunération doit être inscrit sur la déclaration d’intention d’aliéner et dans l’engagement des parties. A défaut, l’agent immobilier ne pourra prétendre à aucune rémunération. Néanmoins, il pourra obtenir la condamnation du notaire fautif à des dommages et intérêts.

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A quel moment la rémunération de l’agent immobilier doit être payée ?

Elle est perçue sans délai une fois que l’opération a été constatée par acte authentique. A défaut, l’agent a 5 ans pour en réclamer son paiement à partir du jour où le titulaire a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l’exercer (C. civ 2224). Si le mandant est un consommateur le délai est de 2 ans (L. 218-2 c. consommation).

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