Dernière mise à jour le 03/01/2020

Le droit de repentir du bailleur

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Le droit de repentir est une faculté offerte au bailleur qui a d’abord refusé le renouvellement du bail commercial avec paiement d’une indemnité d’éviction de revenir sur sa décision en offrant le renouvellement à son locataire. Si le locataire entend refuser le renouvellement, il perdra alors tout droit à l’indemnité d’éviction.

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Le Bailleur qui a signifié un congé sans offre de renouvellement à son locataire doit lui payer une indemnité d’éviction. Toutefois, il peut revenir sur son congé en usant de son droit de repentir, lequel lui permet d’offrir le renouvellement du bail sans lui verser le paiement d’une indemnité d’éviction.

Lorsque l’indemnité d’éviction a été fixée judiciairement, le bailleur dispose d’un délai de 15 jours pour exercer son droit de repentir à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée.

 

 

Comment le bailleur peut-il exercer son droit de repentir ?

A quelles conditions le bailleur peut exercer son droit de repentir ?

Le droit de repentir est ouvert au propriétaire condamné à payer une indemnité d’éviction pour refus de renouvellement. Il peut alors se soustraire au paiement de cette indemnité en usant de son droit de repentir.

Une telle décision est irrévocable, la notification de l’exercice de ce droit constitue à sa date un renouvellement du bail et non une simple offre.

Cette notification devra contenir l’offre de nouvellement du bail et l’engagement de payer tous les frais de l’instance à moins que le propriétaire n’ait utilisé son droit durant l’instance.

  • Situation du locataire et repentir du bailleur

L’exercice du droit de repentir, même intervenu dans le délai, n’est valable que si le preneur :

– est encore dans les lieux loués ; et

– n’a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation.

Il s’agit de conditions cumulatives. Le locataire est considéré comme étant encore dans les lieux tant qu’il n’y a pas eu libération effective et complète des locaux et remise des clés au bailleurs.

Autrement dit, pour priver le propriétaire de son droit de repentir, il suffit, soit que le locataire ne soit plus dans les lieux, soit qu’il ait déjà loué ou acheté d’autres locaux destinés à sa réinstallation. L’absence de l’une de ces conditions rend irrévocable le droit de repentir.

Pour que l’acte d’acquisition ou de location des nouveaux locaux soit opposable au bailleur, le locataire doit démontrer que cet acte a été conclu à une date antérieure à celle de l’exercice du repentir.

  • Délai du repentir

Lorsque l’indemnité d’éviction a été fixée judiciairement, l’article L.145-58 du Code de commerce fixe un délai d’exercice du droit de repentir limite de 15 jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée. Au-delà de ce délai, le refus du bailleur de renouveler le bail commercial devient alors irrévocable.

En conséquence, le bailleur peut exercer son droit de repentir et revenir donc sur sa décision avant l’expiration du bail, ou avant la fixation judiciaire de l’indemnité d’éviction, ou encore pendant la procédure de première instance tendant à cette fixation.

Une fois l’indemnité fixée en première instance, le bailleur peut encore exercer son droit de repentir pendant le délai d’appel et durant la procédure d’appel, celle-ci ayant un effet suspensif.

Si aucun appel est formé, le délai court à compter de l’expiration du délai d’appel , -à savoir un mois en principe à compter de la notification du jugement rendu en premier ressort-, car le jugement acquiert force de chose jugée à cette date (Art. 500 al 2 du CPC).

Si l’indemnité est fixée par un arrêt d’appel, le point de départ est la date du prononcé de l’arrêt et non celle de sa signification aux parties, car le pouvoir en cassation est dépourvu d’effet suspensif.

  • Forme du repentir

L’article  L.145-58 du Code de commerce ne précise aucune forme particulière pour l’exercice du repentir.

En revanche, l’article L. 145-12 al 4 indique que lorsque le bailleur accepte le renouvellement après l’avoir refusé, le nouveau bail prend effet à partir du jour où le repentir a été notifié par acte extrajudiciaire ou une lettre recommandée avec AR.

La jurisprudence admet que le repentir peut être formel ou informel ; seule l’intention du bailleur de renouveler le bail doit être claire et dépourvue d’équivoque et que la date de sa réception par le locataire soit certaine.

A titre illustratif, la jurisprudence a ainsi retenu que constitue un acte informel manifestant clairement cette volonté:

– la signification par le bailleur au locataire de son désistement d’action avec offre de payer les frais de procédure en fixation d’une indemnité d’éviction ;

– la demande en fixation du loyer par l’acquéreur de l’immeuble à l’encontre du locataire auquel le précédent propriétaire avec notifié un congé avec offre d’indemnité d’éviction

N’a pas été reconnu comme une manifestation non équivoque du bailleur d’exercer son droit de repentir :

– la délivrance de quittances de loyers

– son attitude passive découlant du non paiement d’une indemnité d’éviction

– la proposition faite au locataire de conclure un nouveau bail à des clauses et conditions différentes de celles du bail pour lequel le congé a été donné

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Quels sont les effets du droit de repentir ?

  •  Renouvellement automatique du bail

L’exercice du droit de repentir ne constitue pas une offre de renouvellement mais entraîne le renouvellement du bail.

Si le droit de repentir est exercé après l’expiration du bail, le nouveau bail prend effet à compter du jour où le repentir est notifié au locataire par LRAR ou acte d’huissier.

Durant la période intermédiaire comprise entre la date d’effet du congé et celle du repentir, le locataire est tenu de payer une indemnité d’occupation à son bailleur qui est fixée à la valeur locative et à laquelle un abattement de précarité peut être appliqué afin de tenir compte de la précarité de l’occupation pendant la période intermédiaire.

S’il est exercé avant l’expiration du bail, le nouveau bail est fixé à la date d’expiration du bail à renouveler.

  • Loyer renouvelé suite au repentir

L’exercice du droit de repentir et le fait que le point de départ du renouvellement du bail soit décalé ne constituent pas, par eux-mêmes, un motif de déplafonnement.  A ce titre, la Cour de cassation a rappelé à de nombreuses reprises que le bail a pris fin par l’effet du congé, et que l’exercice du droit de repentir est sans influence sur la durée du bail expiré.

A  défaut d’accord sur le montant du loyer du bail renouvelé, celui-ci doit être fixé judiciairement. Le loyer sera plafonné ou déplafonné en fonction des règles applicables en matière de renouvellement.

L’exercice d’un droit de repentir met fin aux procédures, de telle sorte qu’il a été jugé que la poursuite d’une procédure de refus de renouvellement et de résiliation par un pourvoi en cassation devient sans objet.

  • Indemnisation du locataire suite au repentir du bailleur

Le bailleur doit supporter les frais de l’instance que le locataire a exposés jusqu’au terme de l’instance pendant laquelle le repentir a été exercé, incluant généralement les dépens et les frais d’expertise. Aucun dommages et intérêts ne pourront lui être alloués.

  • Caractère irrévocable du repentir

L’exercice du repentir est irrévocable même si le bailleur a ensuite connaissance d’une cause de dénégation.

Seul le preneur peut y renoncer, après le repentir du bailleur, en exerçant son droit d’option prévu par l’article L. 145-57 du Code de commerce, lequel perdra néanmoins son droit à obtenir le paiement d’une indemnité d’éviction.

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