Lorsque le locataire abandonne le logement sans donner congé et sans en avertir son bailleur, celui-ci ne peut le récupérer par lui-même, faute de risquer d’être condamné pénalement pour violation de domicile privé du locataire. Le propriétaire du logement doit respecter une procédure de reprise, dont notre Cabinet est coutumier.
Le bailleur qui soupçonne que son locataire a abandonné le logement doit préalablement s’assurer que le bail ne s’est pas poursuivi au profit de certains occupants, à savoir à ses descendant, ascendants, son concubin etc.
Etape 1 : S’assurer que le locataire à abandonner le logement
Pour faire constater que le logement a été abandonné par le locataire, le Bailleur doit au préalable accomplir plusieurs formalités qui doivent être suivies dans l’ordre suivant.
Envoyer une mise en demeure au locataire
Lorsque des éléments laissent supposer que le logement est abandonné par son locataire, le bailleur doit le mettre en demeure de justifier qu’il occupe le logement (Art 14-1 de loi du 6 juillet 1989).
Cette mise en demeure, faite par acte d’huissier, peut être contenue dans un commandement de justifier d’une assurance locative (art 7 g de ladite loi) ou un commandement de payer (article 24-1 de ladite loi).
Faire établir un constat d’huissier d’abandon du logement
Au visa de l’article 14-1 précité, un mois après la signification de la mise en demeure restée infructueuse, l’huissier peut pénétrer de force dans le logement pour constater l’abandon du logement par le locataire (Art. L142-1 CPCE). A cet effet, l’huissier ne peut pénétrer dans le logement qu’en présence des personnes ci-après énumérées :
– du maire de la commune, d’un conseiller municipal ou d’un agent municipal habilité,
– d’une autorité de police ou de gendarmerie,
– ou de 2 témoins majeurs sans lien avec le bailleur ou l’huissier.
L’huissier constate par procès-verbal que l’abandon du logement et dresse l’inventaire des meubles laissés sur place en indiquant s’ils paraissent ou non avoir une valeur marchande.
Attention: la jurisprudence affirme constamment qu’un simple changement de résidence n’est pas constitutif d’abandon ( En ce sens, CA PARIS, 7 novembre 1984,JP n°1984-025756 et CA PARIS, 12 juin 1985, JP: 1985-023867).
Dans cette hypothèse le bail se poursuit avec l’obligation pour le locataire de payer les loyers jusqu’à qu’il ait été mis fin au bail.
Etape 2 : Saisine du Tribunal pour reprise du logement abandonné
Un décret en date du 10 août 2011 n°2011-945 est venu organiser les modalités de résliation du bail par la mise en place d’une procédure simplifiée de reprise du logement par le bailleur.
Saisine du juge des contentieux de la protection par requête aux fins de reprise du logement
Après le constat d’abandon des lieux dressé par l’huissier, le propriétaire doit saisir le juge des contentieux de la protection par requête adressée au greffe du Tribunal dont dépend le logement aux fins que soient prononcées la résiliation du bail et la reprise du logement.
La requête doit être signée et datée, accompagnée de toutes les pièces justificatives comprenant notamment le constat d’huissier, une copie du bail, une copie de la mise en demeure et un décompte des sommes dues.
Le juge ordonne automatiquement la reprise du logement abandonné ?
Le juge statue sur ordonnance sans débat contradictoire.
S’il ressort manifestement des éléments fournis par le requérant, notamment du constat d’inoccupation des lieux et d’un défaut d’exécution par le locataire de ses obligations, que le bien a été abandonné par ses occupants, le juge des contentieux de la protection constate la résiliation du bail et ordonne la reprise des lieux (En ce sens CA d’Orléans 28 novembre 2018 n°18/01088)..
Il statue également sur la demande en paiement des arriérés de loyers au titre du contrat de location et sur le sort du mobilier (En ce sens, CA de Bordeaux, 11 mai 2020, n°18/01568 ).
En revanche, si le juge rejette la requête, sa décision est sans recours pour le bailleur qui conserve toutefois une procédure d’expulsion classique
Signification de l’ordonnance
L’Ordonnance doit être signifiée par huissier au dernier domicile connu du locataire ou aux derniers occupants du chef du locataire connus du bailleur dans les 2 mois à compter de son prononcé. Passé ce délai, l’ordonnance devient caduque.
La signification contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice :
– l’indication qu’il peut être fait opposition à l’ordonnance par le destinataire qui entend la contester ;
– l’indication du délai d’un mois dans lequel l’opposition doit être formée, le tribunal devant lequel elle doit être portée, et les formes selon lesquelles elle doit être faite ;
– l’information que le destinataire peut prendre connaissance au greffe des documents produits par le bailleur dans le délai d’un mois ;
– l’avertissement qu’à défaut d’opposition dans le délai indiqué il ne pourra plus exercer aucun recours et que le bailleur pourra reprendre son bien.
Si l’ordonnance statue sur le sort de meubles laissés sur place, elle contient également :
– l’avertissement qu’à défaut d’opposition dans le délai indiqué il ne pourra plus exercer aucun recours et qu’il pourra être procédé à l’évacuation des biens laissés sur place ou à leur vente aux enchères publiques ;
– la sommation d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois suivant la signification de l’ordonnance.
Si la signification est faite à personne, l’huissier de justice doit porter verbalement à la connaissance du locataire les indications mentionnées à l’article 5 du décret du 10 août 2011. L’accomplissement de cette formalité est mentionné dans l’acte de signification.
Le locataire peut-il exercer un recours contre l’ordonnance de reprise du logement ?
Si le juge rejette la requête, le bailleur est sans recours. Il peut cependant poursuivre l’expulsion selon la procédure de droit commun.
Le locataire qui souhaite contester la résiliation du bail a un délai d’un mois à compter de la signification pour former opposition par déclaration remise ou adressée au greffe du JCP dans les mêmes formes que la requête (art. 6 du décret du 10/08/2011).
Les parties sont alors convoquées à l’audience par lettre recommandée avec accusé de réception, doublée d’une lettre simple.
Le jugement du tribunal se substitue à l’ordonnance. Si le juge constate que la demande initiale du bailleur est abusive, ce dernier peut être condamné au versement d’une amende civile pouvant aller jusqu’à 10.000 € (Art 32-1 du CPC).
Etape 3 : A quel moment le Bailleur peut reprendre le logement abandonné par son locataire ?
La reprise des lieux s’effectue immédiatement dès que l’ordonnance est devenue exécutoire, soit lorsque le délai d’opposition d’un mois est expiré.
L’huissier dresse alors un procès-verbal de reprise des lieux remis ou signifié à la personne expulsée.
Lorsque le locataire a abandonné le domicile en y laissant des meubles, ces meubles sont vendus aux enchères.
C’est uniquement à partir de ce moment que le propriétaire-bailleur peut retrouver son logement et le relouer.
L’assistance d’un avocat est-elle nécessaire ?
Dans le cadre d’une procédure ayant pour dessein de récupérer le logement abandonné par un locataire, l’assistance d’un avocat spécialisé en droit du logement est indispensable, compte tenu de l’enjeu de cette procédure.
Maître DERHY Lorène, reconnue pour son expertise incontournable en expulsion, saura vous assister efficacement pour récupérer tant votre logement que votre arriéré locatif.