Les parties peuvent déroger au statut des baux commerciaux en décidant de ne pas conclure un bail commercial, pour privilégier la convention d’occupation précaire, dès lors qu’elles manifestent leur volonté de ne reconnaître à l’occupant qu’un droit de jouissance précaire moyennant une contrepartie financière modique. En cas de litige, le juge n’hésitera pas à la requalifier en bail commercial s’il s’aperçoit qu’elle a été conclue dans le but de faire échec aux dispositions légales des baux commerciaux.
Quelles sont les conditions pour conclure une convention d’occupation précaire ?
Issue initialement de la pratique, la convention d’occupation précaire se caractérise, quelle que soit sa durée, par le fait que l’occupation des lieux n’est autorisée qu’en raison de circonstances exceptionnelles et pour une durée dont le terme est stipulé par d’autres causes que celles de la seule volonté des parties (art L. 145-5-1 C. com). Elle nécessite la réunion de deux éléments :
– la fragilité du droit de l’occupant ce qui implique une redevance particulièrement faible ; et
– l’existence de circonstances particulières indépendantes de la volonté des parties légitimant la précarité au moment de la signature de la convention.
La fragilité du droit de l’occupant
La précarité doit être réellement voulue et convenue par les parties. L’intention peut être déduite par un faisceau d’indices que constitue la durée de la convention, les conditions de sa dénonciation ou encore par ses modalités économiques. La seule qualification en tant que telle dans l’acte ne suffit pas.
Elle peut se justifier par :
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Durée de la convention d’occupation précaire :
Elle peut être déterminée ou indéterminée et dépendre de la survenance d’un évènement certain ou incertain mais dont la date de réalisation est incertaine.
La convention peut durer aussi longtemps que la circonstance qui a justifié sa conclusion perdure. La précarité résulte de l’incertitude sur la durée de l’occupation.
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Dénonciation de la convention d’occupation précaire :
La faculté de mettre fin à tout moment sans avoir à respecter un délai de préavis, est un élément probant. Cependant, l’exigence d’un préavis de courte durée ne constitue pas un obstacle.
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Faible montant de la redevance d’occupation :
Constituent un indice de précarité :
– la modicité de la redevance ;
– l’absence d’obligation d’entre des lieux à la charge de l’occupant ;
– l’absence des charges locatives à la charge de l’occupant.
Une cause objective de précarité
Il faut que des circonstances indépendantes de la seule volonté des parties caractérisent la précarité et qu’elles existent au moment de la signature de ladite convention.
La jurisprudence est très stricte en la matière et n’hésitera pas à requalifier la convention en bail commercial en cas de mauvaise application du régime ou fraude des parties.
A titre illustratif, a été accueillie positivement par la jurisprudence :
– l’occupation consentie dans l’attente d’une expropriation ou portant sur un immeuble destiné à être démoli ;
– la convention conclue dans l’attente de trouver un acquéreur pour un local ;
– l’occupation consentie dans l’attente de la réalisation d’une promesse synallagmatique de vente conclue sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt nécessaire à l’achat du local.
Aussi, une occupation consentie de façon discontinue et temporaire peut justifier la précarité, tel que :
– la mise à disposition de deux pièces au profit d’une banque les seuls jours de marché ou de foire ;
– la convention qui accorde à un conservatoire le droit d’utiliser un studio à certains heures de la journée.
Peut justifier également la précarité, la situation géographique de la surface d’un local mis à la disposition de l’occupant, comme l’installation d’un kiosque mobile et démontable dans un hypermarché.
Quel est le régime de la convention d’occupation précaire ?
La convention d’occupation précaire n’est soumise à aucun formalisme. Pour éviter d’être requalifiée en bail commercial, il est conseillé de la rédiger par écrit et d’y mentionner précisément, en préambule, les circonstances particulières qui en justifient sa conclusion. Elle n’est pas limitée dans le temps et peut durer tant que le motif de précarité ayant justifié sa conclusion perdure.
1. Principe : l’exclusion des règles du statut des baux commerciaux à la convention d’occupation précaire
Le régime des baux commerciaux ne s’applique pas à la convention d’occupation précaire.
Il en résulte que :
– l’occupant doit quitter les lieux à l’expiration de la convention ou après sa dénonciation, faute de quoi son expulsion sera ordonnée par le juge ;
– aucune indemnité d’éviction ne pourra être versée à l’occupant ;
– le renouvellement ou la conclusion d’une nouvelle convention d’occupation précaire entre les même parties pour le même local est possible tant que les conditions de précarité sont réunies et n’entraînent pas l’application du statut des baux commerciaux ;
– si l’occupant se maintient dans les lieux au-delà du terme de la convention, le statut des baux commerciaux ne s’applique pas tant que les conditions de précarité existent.
2. L’exception au principe : la fraude des parties à la convention d’occupation précaire
La convention d’occupation précaire doit être exclusive de toute fraude, faute de quoi elle sera requalifiée en bail commercial. Un motif de légitime de précarité ou des circonstances particulières justifiant la fragilité de l’occupation doivent présider à sa conclusion. Le véritable critère doit être recherché essentiellement dans la fragilité de l’occupation, à laquelle il peut être mis fin à tout moment, plutôt que dans sa durée.
En conclusion : Il convient pour les parties d’être particulièrement vigilantes sur les stipulations de la convention d’occupation précaire et d’anticiper le cas échéant sa requalification en bail commercial.
Maître DERHY, compétent en droit des baux commerciaux, vous aidera à faire le meilleur choix afin d’anticiper tout éventuel contentieux et vous assistera dans la négociation et la rédaction de votre convention.