Le refus de signer l’acte réitératif de vente après avoir conclu une promesse synallagmatique de vente constitue un abondant contentieux en matière de vente immobilière.
La promesse synallagmatique de vente est le contrat par lequel une personne promet de vendre un bien à une autre personne qui s’engage à l’acquérir à un prix et à des conditions déterminées. Ainsi, si l’une des parties refuse de réitérer l’acte de vente, l’autre partie peut solliciter en justice l’exécution forcée ou la résolution de la vente.
Toutefois, il en va différemment si ladite promesse est soumise à la réalisation de conditions suspensives au bénéfice du futur acquéreur et que celles-ci n’ont pu aboutir pour des raisons indépendantes à sa volonté. A défaut, le promettant peut obtenir des dommages et intérêts.
A quels risques je m’expose si je refuse de conclure la vente après la signature de la promesse synallagmatique ?
Lorsque l’une des parties manifeste expressément ou par son inertie son refus de réitérer la vente par acte authentique, son cocontractant peut soit engager une procédure en exécution forcée de la vente soit poursuivre la résolution de la promesse synallagmatique de vente ; étant précisé que le demandeur a la faculté de modifier son option tant qu’il n’y a pas eu de décision passée en force jugée.
Risque n°1 : La poursuite de l’exécution forcée de la vente en cas de refus injustifié
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Etape 1 : Saisir le juge pour exécuter la vente
Le principe est que la promesse synallagmatique de vente vaut vente. En cas de défaillance du vendeur ou de l’acquéreur, l’autre cocontractant peut le poursuivre afin d’obtenir l’exécution forcée de la vente par devant le Tribunal de grande instance (R. 211-3 du COJ). Selon la demande, le juge soit condamne la partie défaillante à régulariser l’acte authentique dans un certain délai sous astreinte, soit constate directement la vente. Si dans le premier cas le cocontractant ne défère pas à l’injonction judiciaire, il est nécessaire de saisir à nouveau le juge afin qu’il rende un jugement constatant la vente. Pour éviter cette double saisine, il est possible de solliciter un jugement prévoyant qu’à défaut de réitération par acte authentique de la vente dans le délai imparti, le jugement lui-même vaudra vente.
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Etape 2 : Publier la promesse notariée au service de la publicité foncière
La promesse synallagmatique de vente établie par acte authentique, même assortie de conditions suspensives, doit être publiée au service chargé de la publicité foncière (Art 28, 1° du décret du 4 janvier 1955). Elle permet l’opposabilité des droits de l’acquéreur et lui évite de se faire primer par un acquéreur concurrent ou un créancier du vendeur.
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Etape 3 : Publier le jugement valant vente
Le jugement lorsqu’il vaut vente doit être publié au service chargé de la publicité foncière à la diligence du greffier et de l’avocat poursuivant. Sa publication est obligatoire et doit se faire dans le délai de 3 mois du jour où il est devenu définitif, afin d’être opposable aux tiers. Le transfert de propriété est considéré s’être opéré à la date de l’assignation, sauf précision contraire du jugement.
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Etape 4 : Paier le prix de vente et les frais
Lorsqu’une sommation est faite au vendeur de se présenter à l’étude du notaire pour signer l’acte de vente, l’acquéreur doit les libérer les fonds dans l’éventualité où le vendeur se présenterait pour signer l’acte, car celui-ci peut à tout moment décider de s’exécuter plutôt que de laisser se poursuivre l’instance en cours. En pratique, la poursuite de l’exécution forcée est difficile pour l’acquéreur qui doit bien souvent recourir à un prêt bancaire pour financer son acquisation en totalité ou en partie. Quand bien même l’acquéreur obtiendrait son crédit, celui-ci demeure tenu vis-à-vis de sa banque au paiment des échéances de remboursement et/ou des intérêts alors même qu’il n’a pas la certitude de devenir propriétaire du bien.
Risque n°2 : la résolution de la promesse synallagmatique de vente et le paiement de dommages-intérêts en cas de refus injustifié
Si une vente formée n’est pas exécutée spontanément ou aux termes d’une procédure en exécution forcée, elle doit être résolue par voie de notification ou amiablement. En cas d’échec, la résolution de la vente peut se poursuivre soit judiciairement, soit par le jeu d’une clause résolutoire si une telle clause a été stipulée dans ladite promesse.
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Cas n°1 : la résolution de la vente par notification
En cas d’inexécution grave, la partie non défaillante doit mettre en demeure son co-contractant de satisfaire son engagement dans un délai raisonnable (Art 1226 c. civ). Cette mise en demeure doit mentionner qu’à défaut pour le débiter de satisfaire à son engagement, le créancier sera en droit de résoudre le contrat. Si l’inexécution persiste le créancier lui notifie la résolution et les motifs, soit par LRAR soit par voie de signification. La résolution prend effet à la date de sa notification. Le débiteur peut saisir le juge pour contester la résolution et ce à tout moment. Dans une telle hypothèse, le créancier devra justifier de la gravité de l’inexécution.
Cette voie peut présenter un intérêt lorsqu’il n’a pas été prévue de clause résolutoire dans la promesse.
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Cas n°2 : La résolution amiable de la vente par les parties
Elle suppose l’accord réciproque des deux parties de mettre un terme à leur promesse, qui peut être formalisé par un écrit, courriels, ou un protocole transactionnel. Par ailleurs, les conséquences d’une telle résolution doivent également être formalisées. Ces conséquences sont le plus souvent pécuniaires. Elles concernent classiquement la restitution de la somme versée par l’acquéreur, les éventuels dommages et intérêts versés à la personne qui souhaitait poursuivre la vente. Les parties peuvent également convenir ou non de l’effet rétroactif de la résolution.
En matière de droits de mutation la résolution amiable emporte en principe les conséquences d’une nouvelle mutation et donc l’exigibilité d’une seconde taxation. Sauf exception, les droits dus sur la mutation résolue ne sont pas restituables. Les droits seront liquidités sur le prix qui sera exprimé dans l’acte de résolution. A défaut de mention, les droits seront liquidés sur la même base que le contrat primitif.
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Cas n°3 : La résolution judiciaire de la vente
L’une des parties peut saisir le juge pour que soit prononcé la résolution judiciaire de la vente aux torts de la partie défaillante, outre la condamnation à des dommages et intérêts (Art. 1231 C. civ). Toutefois, il est possible qu’une clause de renonciation par avance au droit de demander la résolution judiciaire soit prévue dans la promesse.
Ainsi, constitue un manquement caractérisé justifiant la résolution : le défaut de paiement du prix par l’acquéreur ou encore le refus de signer l’acte authentique de vente. Les conséquences pécuniaires de la résolution sont fixées par le juge, sauf si elles ont été anticipées par une clause pénale dans ledit acte. De même la date d’effet de la résolution est fixée par le juge, et à défaut elle est fixée au jour de l’assignation (Art. 1229 al 2 C. civ).
Ainsi, un acquéreur a obtenu la résolution de la vente outre des dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel, outre le remboursement de la commission de l’agent immobilier, dans le cas où celui-ci avait appris avant la signature de l’acte authentique de vente que son vendeur avait réalisé des travaux d’extension sans permis de construire. La cour de cassation a reconnu la faute du vendeur en exécutant des travaux en dehors de la règlementation causant un préjudice à l’acheteur qui pouvait craindre une sanction éventuelle et future de l’Administration (Cass. 3è civ., 3 juin 2009, n° 07.19097).
La résolution judiciaire n’entraîne pas l’exigibilité des droits de mutation à titre onéreux. Seuls seront dus les droits sur la mutation initiale.
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Cas n°4 : la résolution de la vente par le jeu de la clause résolutoire
Sa mise en jeu de plein droit suppose que les parties aient préalablement anticipé le risque de défaillance de l’une d’elle par l’insertion d’une clause expresse dans la promesse.