Dernière mise à jour le 13/01/2025

Intermédiaire de locations touristiques : Attention à la Ville de Paris !

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La loi du 19 novembre 2024 n°2024-1039, dite loi “Le Meur” , publié au JO le 20 novembre 2024, a, pour la première fois, responsabilisé les intermédiaires de locations de meublés touristiques en les exposant à de lourdes amendes en cas d’infraction, s’ils apportent leur concours à des locations meublées de type Airbnb pratiquées illégalement.

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I-Qu’est-ce qu’un intermédiaire de location touristique ?

TLe statut des intermédiaires immobiliers a été défini par la loi Hoguet du 2 janvier 1970 n°70-9  en son article 1er  comme suit : « les personnes physiques ou morales qui, d’une manière habituelle, se livrent ou prêtent leur concours, même à titre accessoire, aux opérations portant sur les biens d’autrui (…) ». Autrement dit, d’une manière plus large, est considéré comme un intermédiaire immobilier toute personne physique ou société dont l’activité professionnelles consiste en une activité d’entremise et de gestion locative de biens (comprenant l’activité de location et sous-locations saisonnière, nu ou meublée d’un bien immobilier).

La loi Le Meur en son article L 324-2-2 du code du tourisme définit les intermédiaires touristiques comme “Toute personne qui se livre ou prête son concours contre rémunération ou à titre gratuit, par une activité d’entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d’une plateforme numérique, à la mise en location d’un meublé de tourisme soumis à l’article L. 324-1-1 du présent code et aux articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation (…)”

Il résulte de la combinaison de ces deux articles, que :

  • Les plateformes hébergeant les annonces de location sont exclues de ce texte ;
  • Toute personne (physique ou morale), qui prête son concours, même à titre gratuit, à une activité de location touristique en mettant à disposition des services, ou une activité d’entremise ou de négociation, sont s considérées comme des intermédiaires immobiliers qu’ils soient ou non professionnels. A ce titre, il apparaît raisonnable de penser qu’un proche aidant gracieusement un propriétaire en gérant une annonce de location pour son compte, puisse être sanctionné, au même titre qu’une conciergerie Airbnb.

Toutefois, seule la jurisprudence à venir pourra affiner cette définition sur la qualité d’un intermédiaire immobilier.

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2.L’impunité des intermédiaires touristiques jusqu’à la loi Le Meur du 19 novembre 2024

Si la loi Hoguet imposait aux intermédiairement le respect d’une série d’obligations, comprenant notamment le devoir d’information et de conseil, il n’en reste pas moins que les conciergeries de location touristique bénéficiaient en pratique d’une impunité en cas de manquement à leurs obligations à l’égard des communes jusqu’à lors.

Il a fallu attendre un premier décret en date du 30 octobre 2019, n°2019-1104 pour que les intermédiaires et plateformes numériques aient des obligations à l’égard des communes.

En effet, par ce texte, les communes pouvaient désormais interroger une fois par an les intermédiaires de location touristique aux fins de lui communiquer un certain nombre d’informations concernant les meublés de tourisme dont ils avaient la gestion.

Ils devaient répondre dans un délai d’un mois à compter de la réception du courrier portant opération de contrôle, pour lui communiquer la liste des meublés en location dont ils avaient la gestion, ainsi que les réservations pour l’année civile en cours et celle précédente. Cette mesure s’appliquait également aux biens dont l’intermédiaire n’avait plus la gestion.

En outre, elle sollicitait que lui soient communiqués pour chaque meublé :

– l’adresse du local en précisant le numéro du bâtiment, l’escalier, l’étage et le numéro d’appartement ;

– le numéro de déclaration du meublé

– le nombre de jours loués par votre intermédiaire.

Pour lui adresser les informations requises, la ville de Paris invite l’intermédiaire de location touristique à remplir un tableau, lequel est déposé sur sa plateforme grâce à un lien de chargement privé et unique qu’elle lui aura donné aux termes de son courrier. En cas de diffculté il peutégalement lui adresser un mail afin qu’elle lui propose toute autre modalité de transmission qui respecte le cadre réglementaire de l’article R 324-3 du Code de tourisme.

 

Malgré son entrée en vigueur dès le 1er décembre 2019, il n’en reste pas moins qu’en pratique cette mesure demeurait inefficace, faute d’être assortie d’une sanction, comme il a été rappelé par un arrêt de la Cour de cassation en date du 9 novembre 2022, n°21-20.467 et n°21-20.819 en ces termes :

 « celui qui se livre ou prête son concours à la mise en location, par une activité d’entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d’une plate- forme numérique, en méconnaissance de l’article L. 631-7, et dont les obligations spécifiques sont prévues par l’article L. 324-2-1 du code du tourisme, n’encourt pas l’amende civile prévue par l’article L. 651-2 ».

Cette position a été confortée par un arrêt de la Cour de cassation en date du 7 septembre 2023, n°22-18.101, qui rappelle que la sanction dont il est question est « applicable aux seules personnes offrant à la location un meublé de tourisme déclaré comme leur résidence principale, qui omettent de transmettre à la commune l’ayant demandé depuis plus d’un mois, l’information relative au nombre de jours de l’année précédant la demande, au cours desquels ce meublé a été loué ».

3.La responsabilité des intermédiaires touristiques depuis la loi Le Meur du 19 novembre 2024

Désormais, la loi Le Meur du 19 novembre 2024 a imposé diverses obligations incombant aux intermédiaires immobiliers et a prévu de lourdes sanctions en cas de manquement à ces dernières, inscrites à l’article L 324-2-1 du Code du tourisme.

 

1. Des obligations à l’égard des propriétaires et des sanctions à l’égard de la commune

Désormais, avant d’offrir à la location saisonnière un bien immobilier, qui constitue ou non la résidence principale du loueur, l’intermédiaire doit informer le loueur des obligations :

  • De déclaration ou d’autorisation préalable avant toute mise en ligne de l’annonce ;
  • De déclarer sur honneur le respect de ces obligations, indiquant si le logement constitue ou non sa résidence principale ;
  • Le cas échéant, de reporter sur toutes les annonces le numéro de déclaration, obtenu

A défaut, l’intermédiaire s’expose à une amende de 12 500 € / meublé de tourisme en infraction, conformément aux paragraphes I et III alinéa 1de l’article L 324-2-1 du Code du tourisme

2. Les sanctions en cas de location d’une résidence secondaire sans respecter la procédure de changement d’usage

L’intermédiaire immobilier s’expose à une amende de 100 000 € par meublé en infraction pour toute infraction constatée depuis le 20 novembre 2024 s’agissant des résidences secondaires n’ayant pas respecter la procédure de changement d’usage prescrite par l’article L 631-7 du CCC, aux termes de l’article L.651-2 -1 du code de la construction et de l’habitation. Les plateformes numériques ne sont pas concernées par cette amende.

 

3. Les sanctions en cas de location au-delà de la limite légale de nuitées autorisées pour les résidences principales

Pour les résidences principales, en cas de dépassement à la limite légale, l’intermédiaire risque une amende de 50 000 € par local en infraction dès lors que le bien a été déclaré comme résidence principale du loueur et ce même s’il ne l’offre plus à la location meublée s’il en a connaissance, en application des paragraphes II alinéa 1 et 2 , et paragraphe III alinéas 2 et 3 de l’article L 324-2-1 du Code du tourisme.

Attention, il est rappelé que les communes peuvent désormais abaisser sur délibération la limite légale de 120 jours à 90 jours de location par an selon le IV de l’article L.324-1-1 du code de tourisme. Depuis le 1er janvier 2025, à Paris la limite est désormais de 90 jours par an pour les loueurs de résidence principale selon délibération en date du 20 décembre 2024 n°2024-DLH-398.

4. Les sanctions en cas de non-transmission d’information en cas d’opération de contrôle par la ville

En outre, conformément au nouvel article L.324-2-1 II alinéa 1er du code du tourisme que « Dans les communes ayant mis en œuvre la procédure d’enregistrement mentionnée au III de l’article L. 324-1-1, la commune peut, jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander à tout intermédiaire immobilier, notamment lorsqu’il met le bien sur une plateforme numérique, de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé de tourisme a fait l’objet d’une location par son intermédiaire ».

A cet effet, il devra lui transmettre ces informations dans un délai d’un mois, en rappelant :

  • Le nom du loueur ;
  • L’adresse du meublé ;
  • Son numéro de déclaration ;
  • Et préciser si le bien constitue ou non la résidence principale du loueur.

La commune peut demander un décompte individualisé pour les meublés de tourisme situés sur tout ou partie de son territoire.

En cas d’infraction, l’intermédiaire s’expose à une amende de 50 000 € par meublé en infraction.

Attention dès que vous recevez un courrier portant opération de contrôle, il est indispensable de répondre à la Ville dès lors que votre coopération et les moyens mis en œuvre pour voir cesser l’infraction seront des circonstances atténuantes que les juges apprécieraient si votre dossier devait prendre une tournure contentieuse.

Dans une telle hypothèse, votre amende sera probablement réduite à de plus justes proportions compte tenu de votre bonne foi et de vos diligences.

4. Dois- je me faire assister par un avocat?

Si vous êtes assigné ou si vous recevez un courrier de la ville portant opération de contrôle sur votre activité, il est important de vous rapprocher d’un avocat spécialisé en location meublée touristique afin de vous aider à rapporter la preuve de votre obligation d’information auprès de la Ville, de justifier de la régularité dans la gestion de votre activité ou de tempérer vos erreurs..

Parallèlement, en cas de faute professionnelle de votre part, il est possible que vos clients puissent se trouver à leur tour contrôlé puis assigné par la Ville de Paris ; lesquels n’hésiteront pas à vous appeler en garantie.

C’est ainsi que la réception d’un courrier de la Ville de Paris est une étape à ne pas négliger dès lors que vous risquez des condamnations et sanctions financières multiples et en cascade.

Retrouvez l’avis d’expert de Me DERHY pour le Figaro immobilier sur le fait qu’Airbnb n’est pas un agent immobilier selon la cour de justice européenne

Le Figaro Immobilier a sollicité l’avis de Lorène DERHY en sa qualité de spécialiste en location saisonnière, suite à l’arrêt du 20 décembre 2019 par lequel la Cour de Justice de l’union européenne a reconnu qu’Airbnb n’est pas un agent immobilier.