Dernière mise à jour le 07/01/2020

Comment déplafonner le loyer lors du renouvellement du bail commercial ?

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Lors du renouvellement du bail commercial, le nouveau loyer est fixé par le juge des loyers commerciaux en cas de désaccord entre les parties. Si le principe est que le loyer renouvelé est plafonné par le jeu de la variation des indices, il n’en reste pas moins que dans des cas limitativement énumérés, il peut être établi sur la base de la valeur locative, appelé déplafonnement du loyer. La loi PInel du 18 juin 2014 a instauré une limitation annuelle de 10% à l’augmentation du loyer déplafonné.

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Dans quels cas le loyer du bail renouvelé peut être déplafonné ?

Lors du renouvellement du bail, le loyer se trouve déplafonné dans des cas strictement limités par la loi et décrits ci-après.

Déplafonnement du loyer en raison de la modification notable des éléments de la valeur locative

Dans le cas où les éléments constitutifs de la valeur locative, hormis le prix, auraient subi une altération, le déplafonnement s’impose et une nouvelle valeur doit être fixée par les parties ou à défaut par le juge des loyers.

Selon l’article L.145-33 du Code de commerce, à défaut d’accord entre les parties, le montant du loyer du bail renouvelé doit correspondre à la valeur locative qui est déterminée par l’un ou plusieurs de ces 5 éléments :

1) Les caractéristiques du local considéré ;

2) La destination des lieux ;

3) Les obligations respectives des parties ;

4) Les facteurs locaux de commercialité ;

5) Les prix couramment pratiqués dans le voisinage. Celui-ci n’est pas pris en considération pour apprécier l’existence d’une modification, du moins en tant que facteur propre.

Ces éléments sont repris et déclinés aux articles R 145-3 à R 145-8 du Code de commerce.

La modification notable de l’un de ces éléments constitutifs de la valeur locative suffit à écarter la règle du plafonnement. Le caractère notable peut résulter aussi de la combinaison de plusieurs éléments. En tout état de cause, il doit exister un lien de causalité manifeste entre la modification avancée et l’impact de celle-ci sur le commerce exploité.

En tout état de cause, la modification doit être intervenue au cours du bail expiré jusqu’à la prise d’effet du nouveau bail. Les modifications intervenues avant la date initiale du bail ne peuvent pas être prises en considération.

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Déplafonnement du loyer selon la nature des locaux

Trois catégories de biens immobiliers échappent de plein droit à la règle du plafonnement  :

– les terrains nus : le loyer du bail renouvelé est fixé en considération des éléments propres du terrain (Art.R. 145-9 du C. de com.) ;

– les locaux à usage exclusif de bureaux (Art.R. 145-11 du C. de com.) – étant précisé que pour retenir la qualification « d’usage exclusif de bureaux », il convient de se reporter au bail commercial et notamment à la clause de « destination des lieux » – :  loyer est fixé à la valeur locative par référence au prix du marché pour des locaux équivalents ; et

– les locaux monovalents (Art. R. 145-10 du C. de com.), qui ont un régime autonome spécial de détermination du loyer, à savoir en fonction des usages observés dans la branche d’activité considérée (salle de spectacles, hôtels, cliniques…).

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Déplafonnement du loyer selon la durée du bail

Il y a déplafonnement du loyer commercial dès lors que la durée du bail initial a été conclue pour une durée contractuelle :

– supérieure à 9 ans ; ou

–  égale à 9 ans mais qui s’est poursuivi par tacite-prolongation au-delà de 12 ans. Ce cas se présente notamment lorsque ni le bailleur ni le preneur n’a donné congé ou demandé le renouvellement tant au terme du bail que dans les 3 années qui ont suivi le terme dudit bail. Le loyer sera automatiquement déplafonné à partir de la 13ème année et le bailleur pourra faire fixer le loyer à la valeur locative. Le montant du loyer que le preneur aura alors à régler sera celui de la valeur réelle des locaux pris à bail au jour du renouvellement.

A toutes fins, le bailleur adressera au preneur un congé avec offre de renouvellement par voie d’huissier.

En cas de contestation, le juge des loyers pourra être saisi pour voir fixer judiciairement le montant du loyer à sa valeur réelle. Le preneur aura alors perdu la protection du loyer plafonné.

Dans une telle situation, le Tribunal a un pouvoir d’appréciation souverain. il n’ordonnera la résiliation du bail et l’expulsion du locataire que s’il estime que celui-ci a commis une faute d’une gravité suffisante. Il peut également décider de lui accorder des délais de paiement au vu de sa situation financière s’il estime que sa situation lui permet d’honorer sa dette.

Le bailleur devra adresser un commandement de quitter les lieux que si le jugement ordonne la résiliation du bail et l’expulsion du locataire. Le locataire aura, comme dans le cadre de la procédure de référé expulsion, deux mois à compter de la signification dudit commandement pour quitter le logement. A toutes fins, le locataire pourra saisir le JEX du TGI pour obtenir un délai supplémentaire pour quitter le logement.

Comment se calcule le loyer déplafonné ?

 

 

Le principe : la règle du plafonnement du déplafonnement du loyer

 En vertu de la Loi  PINEL du18 juin 2014, lorsque le loyer déplafonné est fixé à la valeur locative, la hausse du loyer qui en résulte est échelonnée sur la durée du bail renouvelé avec une limite de 10% par an (Art. L. 145-34 al 4 du C. de com). Cette nouvelle limitation, “le plafonnement du déplafonnement”, s’applique aux baux conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014.

Elle a donc vocation a régir les baux dont la date d’effet d’une demande de renouvellement ou d’un congé avec offre de renouvellement est intervenue au 1er septembre 2014.

Cette nouvelle disposition s’applique dans deux cas :

– lorsque le loyer est déplafonné à raison d’une modification notable des éléments constituant la valeur locative.

– pour les baux conclus pour une durée supérieure à 9 ans en application de l’article L. 145-34 du Code de commerce. A la lecture de ce texte, il semblerait que les baux conclus initialement conclus pour 9 ans mais reconduit par tacite prolongation au-delà de 12 ans échappent à cette limitation.

Exceptions au principe de la règle du plafonnement du déplafonnement

Sont exclus à la règle de la limitation en raison de leur régime autonome de fixation du loyer :

– les locaux monovalents

– les locaux à usage exclusif de bureaux

– les terrains

Sont également exclus le loyer du bail renouvelé dès lors que sa fixation est inférieure au loyer en cours.

Les dispositions de l’article L. 145-34 n’étant pas d’ordre public, les parties devraient pouvoir y déroger par une stipulation du bail.

Comment se calcule le montant du loyer renouvelé en cas de plafonnement du déplafonnement ?

 

Application de la règle  du  plafonnement au déplafonnement

La variation du loyer qui découle du déplafonnement ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente (Art. L. 145-34 al 4 du C. de com).

Par exemple : si le loyer initial était de 50. 000 Euros et que le loyer déplafonné fixé par le juge est de 90.000 euros, le calcul s’établira ainsi :

Années 1 : 55. OOO euros / Année 2: 60.500 euros/ Année 3 : 66. 550 euros… Année 7:  90.000 euros. Ainsi, le loyer déplafonné sera atteint qu’à la 7ème année. Si le loyer était de 120.000 euros, celui-ci n’aurait jamais été versé au cours du bail.

 

Que se passe t-il si le loyer fixé par le juge n’aura pas été atteint à l’expiration du bail? 

Il convient de distinguer selon que le second renouvellement est plafonné ou déplafonné à la suite du premier déplafonnement du bail renouvelé.

 

Hypothèse n°1 : le plafonnement s’applique au second renouvellement.

En application de l’article L. 145-34 al 1, le calcul du plafonnement s’effectue sur la fixation initiale du loyer du bail expiré. Autrement dit, le loyer du bail à renouveler s’applique sur le montant du loyer déplafonné tel qu’il a été fixé par le juge au titre du bail expiré.

Donc si le loyer atteint la 9eme année est de 90.000 euros alors que le juge avait fixé le déplacement du loyer à la somme de 120.000 euros, le plafonnement sera calculé sur le loyer fixé initialement soit 120.000 euros, permettant indirectement le rattrapage du loyer déplafonné la 10 ème année. 

Cette solution n’est donc valable que pour les baux à renouveler qui auraient été déplafonnés lors du précédent renouvellement et qui bénéficient à nouveau de la règle du plafonnement et dont la valeur locative est supérieure au loyer plafond.

 Cas n°2 : le déplafonnement s’applique au second renouvellement

Pour les baux déplafonnés de plein droit en raison de leur durée, le rattrapage ne pourra pas avoir lieu puisque le bail renouvelé est un nouveau bail dont le loyer doit correspondre à la valeur locative, qu’elle soit inférieure ou supérieure au loyer initial ; étant précisé que si elle est supérieure, l’application des paliers de 10% s’appliquera à nouveau.

 

Quelle est l’incidence sur l’application d’échelle mobile ou indexation annuelle et la révision triennale légale :

Cas n°1 : En présence d’une clause d’échelle mobile ou indexation annuelle :  

La limitation de 10% s’applique uniquement sur le loyer déplafonné et ne concerne donc pas le jeu de la clause d’échelle mobile. La clause d’indexation s’applique sur le loyer de base qui correspond en réalité au loyer déplafonné fixé par le juge . Ainsi, si le loyer initial est de 50.000 euros et que le loyer déplafonné est de 90.000 euros avec une variation indiciaire de 2%, le calcul sera de : 50.000 + (50.OOO euros x 10% + 90.000 euros x 2%) = 56.800 euros.

Cas n°2 : En présence d’une révision triennale légale : 

C’est sur le loyer initial déplafonné fixé par le juge que doit s’appliquer la première révision triennale légale, la règle de 10% ayant pour seul effet de limiter l’augmentation résultant du déplafonnement du loyer.

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